1789 : Les Droits de l’Homme et du Citoyen, la séparation des pouvoirs et l’abolition des privilèges

1789 : Les Droits de l’Homme et du Citoyen, la séparation des pouvoirs et l’abolition des privilèges

C’est au prix de nombreux morts et de nombreuses révoltes que le petit peuple a obtenu, en 1789, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et l’abolition des privilèges de l’aristocratie. Cela a permis  au peuple d’obtenir plus de droits et de justice, et de séparer les pouvoirs, la clé pour aller vers la démocratie.  

Le contexte : un climat social et politique tendu, de fortes attentes populaires d’égalité et de meilleures conditions de vie

Un climat social et politique tendu

Avant la Révolution déjà, le climat social était très tendu : au début de l’année 1789, plusieurs centaines d’émeutes éclatèrent, dont certaines furent violemment réprimées. Le prix du pain et le contexte économique en étaient les principales causes : le peuple avait faim. Au mois de mars, les villes de Rennes, de Nantes, de Cambrai et de Marseille furent le théâtres de violentes manifestations. Petit à petit les troubles gagnèrent la Provence, la Franche Comté, les Alpes et la Bretagne, et bientôt Paris. Les pénuries de grain et la crise de subsistance du printemps 1789 avaient déjà provoqué des mouvements de rébellion dans les campagnes, accentués par les événements parisiens de juillet. De nombreux paysan-ne-s refusèrent également de payer les prélèvements royaux ou seigneuriaux. Ils furent sévèrement réprimés, condamnés à mort, aux galères et à la prison. Le peuple des villes ne soutenait pas ses répressions et on assista parfois à des actes de solidarité, où des urbains tentaient de délivrer des ruraux. Les paysan-n-es revendiquaient une meilleure représentation, voire la reconnaissance d’un quatrième ordre.

On vit ainsi des liens entre les mouvements ruraux et urbains, qui se croisèrent parfois. Les révoltes de la capitale ont transmis une onde de choc, et des mouvements eurent lieu à la fois dans les villes et les campagnes. Toutes et tous demandaient du pain mais aussi la fin de l’arbitrage royal et des privilèges.

L’ouverture des Etats Généraux

C’est dans ce climat de rébellion que s’ouvrèrent les Etats Généraux le 5 mai 1789. 1177 députés furent admis à siéger : 604 pour le Tiers-Etat, 295 pour le clergé, et 278 pour la noblesse. Les Etats Généraux permirent à une partie du peuple de s’exprimer, à travers la rédaction de cahiers de doléances. Malheureusement, seuls les hommes de 25 ans et plus, inscrits sur les rôles d’imposition pouvaient participer. De fait, les vagabonds, les mendiants et les très pauvres (dont les charpentiers) ne purent s’exprimer. Les femmes non plus, sauf celles qui appartenaient à une corporation.

Les demandes du peuple : l’égalité  et la fin des privilèges, des conditions de vie dignes

Dans les cahiers de doléance, le petit peuple demandait l’égalité, la liberté, et le droit au bonheur, mais dans des termes différents. Les urbains demandaient l’égalité des droits, la liberté d’expression, l’instruction, le maintien de l’organisation corporative. Les ruraux demandaient l’égalité fiscale (que les 3 ordres soient soumis à l’impôt), la fin des droits seigneuriaux, la liberté d’aller au moulin de son choix, le développement des échanges, des routes, des canaux et l’amendement des terres. Ils demandaient du pain, la possibilité de se nourrir dignement. Certains ne demandaient qu’une porte, une cheminée et une fenêtre afin de pouvoir se chauffer. La suppression des taxes sur le cuir pour porter des souliers et non plus des sabots. Ils demandaient à être soignés comme les citadins, alors que la moitié des médecins en poste s’occupaient des urbains (qui ne représentaient que 15% des habitants). Les paysan-n-es s’inquiètaient pour leurs enfants du travail précoce qui ruinait leur santé. Les femmes, qui pouvaient très peu s’exprimer, ont envoyé des pétitions où elles demandaient la possibilité de faire entendre leur voix, que leur métier soit reconnu. Elles demandaient plus d’égalité entre les hommes et les femmes.

En somme le peuple demandait des conditions de vie dignes, la fin des privilèges et l’égalité entre le Tiers-Etat et les deux autres ordres.

La liberté guidant le peuple, tableau de Eugène Delacroix, 1830

Comment les attentes populaires ont-elles débouché sur l’obtention d’un changement de régime ?

Le 14 juillet : la prise de la Bastille

Très vite, l’assemblée entama des discussions derrière le député Mounier, et La Fayette qui, inspiré par son passage aux États-Unis proposait déjà une déclaration des droits de l’homme. Mais le roi précipita les événements, il renvoya son ministre des Finances Necker, tenu responsable du désordre. Ce fut une véritable consternation pour le peuple qui le tenait en estime. Louis XVI ordonna de plus la concentration des troupes autour de la capitale, afin d’étouffer la rébellion par les baïonnettes. Sous l’impulsion de Camille Desmoulins, le peuple parisien se rassembla et la révolte commença à s’installer dans la capitale. Le 14 juillet, on donna l’assaut à la Bastille, une ancienne forteresse devenue prison qui, pour les Parisiens, représentait le symbole de l’absolutisme, L’assaut de la Bastille fit dès le début 88 morts et 73 blessés par balle. Les participants étaient surtout des gens de métiers, artisans et salariés, des maîtres d’ateliers, des compagnons et des artisans, comme le rappelle l’écrivain Eric Vuillard dans son roman 14 juillet. C’était donc des citoyens ayant un métier et un domicile fixe, et non les gens « sans foi ni loi » décrits parfois. La Bastille fut prise et rasée. A son retour d’une chasse, le roi étonné demanda « C’est une révolte ? » « Non Sire, c’est une révolution ». Louis XVI, une fois de plus recula et rappela Necker.

La bastille dans les premiers jours de sa démolition, Aquarelle de Jean Pierre Houel, 1789

La « Nuit du 4 août » : l’abolition des privilèges

La monarchie absolue menacée, les premiers nobles commencèrent à émigrer. La nouvelle assemblée nationale improvisa une Garde Nationale aux ordres du marquis de La Fayette, et arbora les premières cocardes tricolores (le blanc des Bourbons était glissé entre le bleu et le rouge de la ville de Paris). Très vite, la révolte s’installa dans la capitale, et des rumeurs alarmistes (complot aristocratique, invasion étrangère…) provoquèrent « La Grande Peur » dans les campagnes. La fureur des paysan-ne-s se déchaîna contre les demeures féodales qui furent brûlées et saccagées durant l’été. La nuit du 4 août, l’Assemblée discuta des moyens pour enrayer ces émeutes, et au fur et à mesure des discussions, elle abolit peu à peu tous les droits féodaux. Le 11 août, un décret déclara l’égalité civile et fiscale : c’est le plus grand bouleversement légal que la France ait connu. L’Ancien régime et les privilèges s’écroulèrent en l’espace d’une nuit.

Le 26 août : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen

Le 26 août, l’Assemblée adopta la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dont les députés représentants du Tiers Etat Mirabeau et Sieyès étaient les principaux rédacteurs. Cette déclaration est maintenant devenue le modèle de la plupart des Constitutions modernes. Elle établit les droits fondamentaux de l’être humain : le droit à la liberté, à la sécurité, à l’égalité de tous devant la loi et, enfin le principe de la souveraineté populaire, par lequel la Nation, et non plus une royauté de droit divin, est proclamée dépositaire du pouvoir.

Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789

Concrètement, qu’a obtenu le peuple ?

Un régime plus démocratique avec des droits et libertés fondamentaux

  • Le roi a perdu ses pouvoirs absolus et partage son pouvoir avec l’assemblée, qui propose et vote les lois : la Révolution pose le principe de la séparation des pouvoirs ;
  • Le petit peuple est entré dans la vie politique (certains hommes, en fait, car les citoyens appelés « passifs », c’est-à-dire les femmes, les pauvres… n’avaient pas le droit de vote). Il a gagné le droit d’élire ses représentants qui siègent à l’Assemblée ;
  • La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a été adoptée comme préambule à la Constitution : égalité des droitsliberté d’opinion et de la presse, respect de la propriété.
  • Le pouvoir d’ordre d’emprisonnement donné par le roi (lettre de cachet) a été supprimé, le principe de la présomption d’innocence a été  reconnu, l’organisation des tribunaux simplifiée.

La fin des privilèges, plus d’égalité fiscale

  • Tous les citoyens paient un impôt, en fonction de leur revenu ;
  • L’industrie et le commerce sont libéralisés : tous peuvent en faire leur métier : cela n’est plus réservé au bon vouloir des corporations ;
  • Les droits de douane et les péages sont supprimés à l’intérieur de la France ;
  • Les biens du clergé sont confisqués et vendus par l’Etat;
  • L’Assemblée a voté la constitution civile du clergé : les prêtres sont fonctionnaires et payés par l’Etat ;
  • Les départements sont créés avec chacun sa ville principale. La loi est la même pour tous sur tout le territoire.

et quelques autres acquis importants …

  • L’école devient publique.
  • Le mariage civil existe et le divorce est possible.

En résumé, la Révolution de 1789, porté par les mouvements populaires, a profondément changé le système politique, social et économique français. Une inspiration durable partout dans le monde, qui montre que changer de système n’est certes pas simple, mais possible ! Et vous, qu’est-ce que cela vous inspire ? Dites-le-nous en commentaires :).

Pour aller plus loin…Nos sources :

militant-pop