C’est quoi les classes populaires ?

Vous avez déjà entendu parler de « la classe populaire » ou « des milieux populaires » mais de qui s’agit-il ? De quoi parle-t-on ?

Pour le sociologue, O.Schwartz, il s’agit de toutes les personnes qui ont « une positon matériellement et culturellement dominée dans notre société et dont les chances de vie et les conditions de vie sont marquées par un espace des possibles relativement restreint ».

Concrètement, cela se traduit de 4 façons :

  1. les personnes de catégorie populaire sont majoritaires… mais invisibles ;
  2. les personnes de milieu populaire connaissent la galère, avec des métiers pénibles et précaires… Elles y résistent autant que possible par l’entraide et la débrouille ;
  3. les personnes de milieux populaires sont souvent méprisées et rejetées.
  4. les personnes de milieux populaires manquent d’avenir.

Nous faisons ces constats à partir de nos expériences mais aussi de la lecture de spécialistes (sociologues, géographes etc…). Vous en saurez plus en consultant cet article et d’autres, plus détaillés,  sur chaque point.

Une grande majorité de la population … invisibilisée

Lorsqu’on regarde les médias, si on écoute les politiques, on peut avoir l’impression qu’une grande majorité de la population fait partie de la classe moyenne. Pourtant, en réalité, en France, les milieux populaires constituent la grande majorité de la population. En effet, selon l’INSEE il s’agit de 50% des actifs (CSP ouvriers et employés). Alors que 60 à 80% des français pensent appartenir à la classe moyenne. C’est ce qu’on appelle l’invisibilisation des milieux populaires. Cette invisibilisation est aussi politique : moindre présence dans les partis, dans les lieux de pouvoir… Or, ce phénomène est pénalisant. Les difficultés des milieux populaires sont moins visibles, et donc moins prises en compte.

Certes, parmi les milieux populaires, on observe de grandes disparités de conditions de vie. Entre un petit fonctionnaire ou un ouvrier en CDI proche de la retraite, qui ont pu s’acheter une maison ; et un.e jeune intérimaire qui peine à trouver de la stabilité, ou encore une famille qui va d’hôtels en hôtels faute de logement, il y a un monde. Et pourtant, toutes ces personnes ont plus de points communs qu’il n’y parait. Faire partie de la classe populaire, cela signifie avoir des conditions de vie communes, plus difficiles que le reste de la population.

La galère au quotidien

Le premier point commun, c’est ce qu’on pourrait appeler, « la galère ». C’est à dire, des ressources limitées et une situation instable, qui ne permettent pas de boucler les fins de mois sereinement. Cela entraine de nombreuses difficultés au quotidien, sources de beaucoup de soucis :

  • des revenus économiques modestes, que ce soit en termes de niveau de salaire ou de retraite, ou de capital (économies, propriété d’un logement, …). De ce fait, ils ne suffisent pas pour « boucler les fins de mois », ou permettent tout juste de s’en sortir ;
  • cela induit une dépendance aux minimas sociaux pour vivre. Or, avoir les minimas sociaux va souvent avec un jugement négatif des autres. Et parfois aussi avec du contrôle,  et des complications administratives. Sans oublier qu’il n’est jamais agréable de se sentir dépendants, pour sa fierté personnelle.

De ce fait, dans ces milieux populaires, les conditions de vie sont plus difficiles. Par manque de ressources, les personnes sont moins bien logées, ont plus de mal à payer des soins,  une voiture et à se déplacer, sans même parler des loisirs ou des vacances… Les complications administratives rajoutent du souci, du stress. C’est la galère. Face à cela, chacun.e cherche des solutions avec de la débrouille et de l’entraide (aide des ami.es, de la famille, bricolage…).

La pénibilité et la précarité

Ces revenus modestes sont liés à des métiers souvent pénibles, parfois précaires. Ce sont aussi des métiers plus exposés à différents risques tels que le chômage, l’usure professionnelle :

  • les emplois occupés sont souvent usants physiquement ou psychiquement. Il s’agit par exemple de métiers d’ouvriers, de ménage, de livraison. Il s’agit aussi de postes avec peu d’autonomie et un contrôle fort.
  • beaucoup de personnes n’ont pas accès à l’emploi, ou alors dans des conditions dégradées. Enchainer les CDD, avoir un temps partiel subi, alterner périodes d’emploi et périodes de chômage plus ou moins longues…Tout cela ne permet pas la stabilité et la sérénité. Le chômage abîme aussi la confiance en soi, cause des dépressions voire des suicides.

Ces conditions d’emploi pèsent sur la santé physique et morale, à tel point que l’espérance de vie en est réduite. Ainsi, aujourd’hui en France, un ouvrier a 7 ans d’espérance de vie  de moins qu’un cadre selon l’observatoire des inégalités. Face à cela, de nombreuses mobilisations existent, pour améliorer les conditions de travail : grèves, négociations syndicales, création de coopératives…

Le mépris et le rejet

Etre issu d’un milieu populaire, c’est aussi subir le mépris et le rejet des personnes de milieux sociaux plus favorisés. Ce mépris vient parfois même du sommet de l’Etat :

  • le mépris s’exprime d’abord dans la façon de parler des milieux populaires. Dans les médias, en politique, l’image donnée est souvent dévalorisante ou condescendante. Cela se sent aussi parfois dans la façon dont on nous parle et juge, dans la rue, au restaurant, au travail…
  • Or, ce ne sont pas que des paroles en l’air : ce mépris a des conséquences importantes. Il se traduit par des discriminations : à l’embauche par exemple, ou pour accéder à un logement dans certains endroits.
  • cela se traduit aussi par des exclusions, de certains quartiers, pour entrer dans certains endroits (magasins, boites de nuit), ou pour inscrire ses enfants dans certaines écoles. De fait, les milieux plus aisés évitent au maximum les classes populaires.
  • le pire, c’est que souvent, les personnes concernées se sentent inférieures, elles pensent que cela est mérité. C’est comme si elles avaient intériorisé le mépris avec lequel on les considère. C’est un mécanisme bien connu qu’on appelle l’aliénation ou la « domination symbolique ».

Face à cela, les milieux populaires ne sont pas passifs. Chacun.e résiste à sa façon, par l’humour, la dénonciation, le mépris inverse… Différentes formes de contre-cultures permettent de dénoncer, ridiculiser tout cela, et retrouver de la fierté.

Le manque d’avenir

En plus de vivre dans des conditions difficile au présent, il est très difficile d’améliorer sa condition future ou celle de ses enfants. En effet, en dehors de quelques exceptions, il y a peu d’ascension sociale depuis les années 80 :

  • les familles de milieux populaires accordent souvent une grande importance à l’école, en espérant qu’elle permette à leurs enfants de s’en sortir mieux. Pourtant, en fin de compte, la plupart de ces enfants ressortent de l’école avec peu de diplômes ou arrêtent l’école trop tôt.
  • or, après l’école, plus le niveau de diplôme est bas et plus les perspectives sont restreintes
  • ainsi, au final, l’ascension sociale marche au ralenti : seuls 1/3 des enfants d’ouvriers améliore sa condition, alors que les 3/4 des enfants de cadres restent cadres. Il y a même une forme de déclassement pour les classes moyennes, dont 1/3 des enfants voit sa situation se dégrader.

Pourtant, face à cela, de nombreuses personnes gardent espoir et restent combattives. L’investissement dans l’école, la création d’association, la création d’entreprises en témoignent. Les mobilisations collectives aident aussi à cela (associations, syndicats, partis…). De nombreux exemples existent : retrouvez en quelques-uns ici.


Voici donc en bref, la situation des milieux populaires. Pour dresser ce portrait, nous avons consulté de nombreuses sources. Vous les trouverez en détail dans nos autres articles.  Si vous voulez apporter des nuances, des précisions, des commentaires… Si vous voyez des erreurs, des éléments qui manquent. Si vous avez des désaccords… N’hésitez pas, dites le-nous en commentaire !