Partir en vacances aujourd’hui en France : un droit ou un luxe ?

Partir en vacances aujourd’hui en France : un droit ou un luxe ?

Partir en vacances, ça parait une évidence… Et pourtant, 40% des français.es ne partent pas même l’été. A quoi ça sert de partir en vacances ? A t-on le droit de partir en vacances quand on est au chômage ? Quand on est pauvre ? Bien sûr on en a encore plus besoin ! Quelles sont les conditions, peut-on avoir des aides ? Tour d’horizon!

Les vacances, un grand bienfait … mais pas pour tous.tes !

Le besoin de partir en vacances, c’est comme une évidence

Pourquoi partir en vacances ? Parce que ça fait du bien, évidemment :)! Les liens familiaux se resserrent, on renforce notre confiance en soi (notamment avec le sport), c’est un temps de ressourcement qui permet d’être ensuite plus fort pour affronter le quotidien. Partir en vacances est aussi important pour ne pas se sentir exclu.e, pouvoir échanger avec ses collègues, se sentir un bon parent pour ses enfants…

Des jeunes qui sont partis en vacances en montagne grâce à l’association 82-4000 Solidaires témoignent : « la montagne permet de se rendre compte que l’on est capable d’accomplir des choses par soi-même et que l’on peut puiser une force intérieure pour se dépasser, aller au-delà de ses limites…. » ; « j’ai ressenti qu’il y avait beaucoup de fraternité dans le groupe, les gens s’entraidaient. De plus, la montagne permet de surmonter la rencontre avec un patron, avant on se dit je n’ai pas de chance, tout va mal, puis ensuite on est regonflé et on a envie de s’en sortir ».

Et pourtant les vacances, ce n’est pas pour tout le monde !

En France, alors même que tout le monde a droit aux congés payés depuis 1936, de nombreuses personnes n’ont pas la chance de partir en vacances, ou alors pas très souvent, pas très longtemps…

Ainsi, les classes populaires partent moins souvent en vacances, moins longtemps, et pas dans les mêmes conditions que les classes plus aisées, d’après l’Observatoire des inégalités. Ainsi 80 % des cadres supérieurs partent en congés chaque année, contre 50 % des ouvrier.es et 58% des employé.es. C’est à dire que 40 à 50% des classes populaires ne partent pas en vacances, même l’été.

De plus, peu de personnes partent plusieurs fois dans l’année. Seul 22 % de la population part plusieurs fois par an. Pouvoir partir en vacances en dehors des vacances d’été reste un luxe.

Enfin, la destination n’est pas la même selon les catégories sociales. Ainsi, partir loin reste un privilège :  la moitié des voyages en avion sont réalisés par les 2 % des personnes les plus riches. Pour la grande majorité des personnes, prendre l’avion est impossible financièrement, en dépit du développement des compagnies à bas prix : c’est aussi le coût sur place qui fait la différence.

Qu’est-ce qui nous empêche de partir en vacances ?

Plusieurs causes empêchent de nombreuses personnes de partir en vacances. C’est avant tout une question de moyens financiers, mais pas seulement. La précarité de l’emploi, les habitudes sociales comptent aussi.

Une question de moyens financiers

Pour partir, il faut en avoir les moyens.  Un « budget vacances » pour une famille peut représenter plusieurs centaines d’euros voire bien plus : impossible pour la majorité des bas salaires. La possibilité de partir dépend beaucoup du revenu. Ainsi en 2014, partir en vacances concernait :

  • 40 % des personnes aux revenus inférieurs à 1 200 euros mensuels
  •  86 % des personnes aux revenus supérieurs à 3 000 euros.

De plus, les classes populaires ne sont pas les plus aidées. En effet, il existe des aides aux vacances, mais qui dépendent souvent du comité d’entreprise par exemple, auquel tout le monde n’a pas accès… A l’inverse, les plus aisés ont davantage l’occasion de bénéficier d’hébergements gratuits par la famille ou les ami.es.

La précarité

Quand on n’a pas de travail, on ne s’estime pas légitime à prétendre à des vacances. Comme l’explique la sociologue Joëlle Bordet : « Le droit aux congés payés est une conquête de 1936. Pour autant, il a fallu du temps pour que les gens s’autorisent effectivement à partir en vacances. A l’époque, nombreux étaient ceux qui avaient du travail, or le travail est ce qui structure les vacances. La situation est différente aujourd’hui : de plus en plus de personnes enchaînent les petits boulots et vivent des périodes de précarité très in sécurisantes. Cette fragilisation de l’accès à l’emploi stable a un impact sur les vacances. » Les personnes précaires n’osent pas partir car elles ne savent pas de quoi sera fait demain.

Une question de mode de vie

Enfin, partir en vacances dépend aussi plus largement du milieu social. Plus on monte dans l’échelle sociale, plus on a de chances de partir. Les cadres partent plus en vacances que les ouvrier.es et employé.es. C’est une question de revenu, mais aussi de mode de vie. En effet, dans certains milieux sociaux plus aisés, partir en vacances, en voyage à l’étranger, au ski, est à la fois un goût et une habitude, souvent prise depuis l’enfance. Mais c’est aussi quelque chose de valorisé par l’entourage. Il y a une forme d’incitation à partir loin, par comparaison, parce que ça fait rêver… A l’inverse, rester à la maison pour les vacances parait incongru. 

Vacances pour tous.tes : un droit, un besoin, une lutte à poursuivre

Les congés payés et les vacances sont un droit pour tous.tes

Le peuple s’est battu pour obtenir des congés payés, de grandes victoires ont été obtenues en 1936. Ainsi, les salarié.es ont des droits particuliers. Retenons que chaque salarié a droit à 2,5 jours ouvrables – samedi compris – de congés payés par mois de travail effectif et cinq semaines de congés payés pour une année complète de travail. Pour connaître le détail de vos droits en tant que salariés, rendez-vous sur ce site .

Mais le droit aux vacances pour tous.tes est aussi inscrit dans la loi de 1998 relative à la lutte contre les exclusions. Les vacances nous permettent de nous ressourcer, de retrouver une vie de famille plus saine, de réfléchir au sens de sa vie, de se reposer pour mieux repartir. Les personnes qui ont des difficultés ont en donc encore plus besoin. De plus, savez-vous que les personnes qui partent en vacances travaillent mieux par exemple (d’après l‘étude américaine « Project : Time off »? Alors n’hésitez-plus! Nous avons tou.tes le droit et le besoin de partir en vacances même si nous ne travaillons pas.

Si vous manquez d’argent, il existe de nombreuses aides, mais elles ne sont souvent pas assez connues ! Voici quelques infos pour que vous puissiez mieux en profiter.

De nombreuses structures proposent des aides

Pour obtenir des aides, plusieurs solutions existent. Ces aides sont souvent attribuées sous condition de ressources, pour les familles modestes. En clair, ces aides sont faites pour vous, alors n’hésitez pas à passer un coup de fil ou à vous y rendre ! Voici un petit panorama de ce qui existe :

  • si vous avez un travail, vous avez peut-être accès à un comité d’entreprise et aux fameux chèques-vacances de l’ANCV.
  • si vous êtes retraité.e, il est possible que votre caisse de retraite et/ou votre complémentaire proposent des aides pour les vacances. Vous pouvez aussi accéder au programme Seniors en Vacances de l’ANCV, renseignez-vous !
  • quelque soit votre statut, la CAF (Caisse d’Allocations Familiales) propose aussi des aides aux vacances pour les foyers modestes, qui sont trop peu connues : Aide aux Vacances Familiales (AVF), Aide aux Vacances Sociales (AVS), Aide aux Vacances Enfants (AVE), bons temps libres pour les jeunes…
  • au niveau local, n’hésitez pas à aller voir en mairie, au CCAS (centre communal d’action social), au centre socio-culturel, à la maison de l’enfance, au centre de loisirs ou au centre socio-culturel. La plupart des mairies proposent régulièrement des séjours tout organisés et à prix réduits, pour les familles, les enfants, les jeunes, les seniors… Pratique quand on a peu de moyens et de temps pour s’en occuper !
  • De nombreuses associations aident aussi à partir en vacances, comme la Croix Rouge, le Secours Populaire, les Petits Frères des Pauvres ou encore Vacances Ouvertes
  • enfin, il existe aussi souvent des aides spécifiques pour les jeunes. Par exemple, le dispositif 18:25 de l’ANCV propose une aide aux vacances en échange d’un service civique.

Le droit aux vacances et aux congés payés reste une lutte à poursuivre

Même si les aides peuvent aider à court terme, nous voudrions tous.tes pouvoir partir en vacances sans avoir besoin de demander de l’aide, avec nos propres moyens.

Ainsi, le combat pour le droit aux vacances n’est pas terminé. En 2016, la loi Travail a apporté quelques améliorations : par exemple elle permet permet aux nouvelles recrues de bénéficier de leurs congés dès leur embauche sous réserve d’accord de l’employeur, plus besoin d’attendre un an pour partir en vacances …Elle donne également les mêmes droits de congés supplémentaires aux jeunes mères et aux jeunes pères de plus de 21 ans.

Mais comme le montrent les analyses évoquées plus haut, pouvoir partir en vacances dépend aussi beaucoup du niveau de salaire, du statut de l’emploi, de son entourage…  Bref, le droit aux vacances passe avant toute chose un travail bien payé et non précaire : c’est notre combat !

Et vous, pouvez-vous partir en vacances ? Si non, qu’est-ce qui vous en empêche? Avez-vous déjà eu des aides ? Avez-vous des propositions, des revendications à proposer sur ce thème ? Ecrivez-nous ! Partageons-les pour les faire entendre et les rendre concrètes!

Pour en savoir plus – nos sources :

militant-pop

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